« Elle m’a regardée longuement, patiemment, radicalement. La Vénus blanche attendait tout de moi, mon attention, ma substance, mon ignorance. Une catastrophe salutaire. Des mots surgirent alors de ce terreau commun. Mon exil prit fin à cet instant précis. »

Issus de la confrontation décisive avec l’œuvre d’Eugène Leroy, les textes d’Élizabeth Demidoff ne sont ni des commentaires du travail du peintre, ni même une illustration qui en accompagnerait l’effort : ils sont les fruits d’un mûrissement du regard, la manifestation patiente d’un contact avec les tableaux « sculptés » du grand peintre, d’où émergent des voix chargées encore des interrogations qu’ils suscitent. Dans cette forge, ils deviennent objets à part entière, présences conservant l’empreinte de la rencontre et de l’étonnement initial. Au plus près de la sensation s’invente alors un dialogue qui brise tout discours sur l’art, qui s’affirme du dedans, et invite à revivre le face-à-face pour nous permettre de voir autrement.

Paul Valéry l’affirmait : « les tableaux demandent une réponse » : les textes d’Élizabeth Demidoff se tiennent au plus près de cet appel.

Préférant le dialogue et l’écoute sensible à la froide analyse, chaque écrit se présente comme un bref poème placé en regard du tableau d’Eugène Leroy qui l’a suscité. Mobilisant dans sa matière propre l’impact intériorisé du tête-à-tête fondateur, il devient le témoin d’une force vivante qui circule entre une œuvre et l’interlocutrice venue à sa rencontre. Le résultat de ce contact privilégié met à l’honneur la recherche d’Eugène Leroy pour saisir le réel à travers les pièges de l’image. Cet affrontement, le philosophe Paul Audi en connait bien les enjeux, qu’il a magnifiquement éclairés dans ses différents essais consacrés au peintre. Il nous offre ici une préface inédite, dont un extrait sera lu, complétant la rencontre et prolongeant la profonde admiration vouée à ce dernier. Avec Robert Bouvier

Théâtre du Passage, petite salle